Alfred Hitchcock enfermé dans la cellule d'un commissariat

Et si l'oeuvre du maître du suspense trouvait sa source dans cet épisode cruel de l'enfance ?
Alfred Hitchcock le 30 octobre 1960 à Rome
Alfred Hitchcock, le 30 octobre 1960 à Rome.KEYSTONE USA / VISUAL Press Agency

Imaginez l’East End londonien en 1899, une banlieue pauvre où les féministes recrutaient leurs militantes parmi les ouvrières. C’est là qu’est né Alfred Hitchcock, dans un quartier où la maréchaussée était mal vue, car elle était perçue comme gardienne d’un ordre protégeant les riches et leurs privilèges. Dans la famille Hitchcock, on était pourtant volontiers solidaire des cops, la grand-mère d’Alfred était fille d’agent de police, et son père William, un épicier féru de discipline, cultivait une certaine connivence avec le commissaire local.

William aimait son fils Alfred, il parlait de lui comme de sa « petite brebis sans tache ». Qu’est-ce qui lui prit le jour où il expédia le brave Alfred au commissariat, à l’âge de quatre ou cinq ans, avec mission de remettre une lettre à la sommité du lieu ? Alfred jura toute sa vie qu’il ne se souvenait plus ce qui avait pu provoquer une punition pareille. Le gamin remet donc la missive au commissaire, qui la lit et l’enferme illico dans une cellule pendant dix minutes en expliquant que « c’est ce qu’on fait aux petits garçons méchants ».Vraie ou fausse, l’anecdote fut ressassée par le cinéaste aux journalistes, collaborateurs et acteurs, éberlués. Alfred Hitchcock l’a t-il quelque peu enjolivée, confondant à dessein le cerbère du violon avec son austère papy ? En racontant cette histoire à François Truffaut lors de leurs fameux entretiens, il ajoute ceci : « On demande à tous les petits garçons ce qu’ils veulent devenir quand ils seront grands. Il faut porter à mon crédit que je n’ai jamais répondu policeman ». Fiction ou non, l’auteur de Sueurs froides livre ici une clé freudienne à sa terreur des flics, du père, son obsession des vrais et faux coupables.